dimanche 5 avril 2020

Le masque et les faux-semblants

En ce temps de confinement, le mot de "masque" a des échos bien réels et urgents, comme ce qui peut faire la différence entre la vie et la mort. Mais ils y a d'autres masques que ceux-là... 
Nous entrons aujourd'hui dans la semaine des faux-semblants. 
Aujourd'hui, jour de Carême, c'est Jésus qui monte à Jérusalem, impassible, au milieu de la foule en délire qui l'adore et se livre à des manifestations de joie débordante : enfin, le libérateur, le guérisseur, le plus grand des prophètes, le fils de Dieu en personne s'approche, il va livrer la plus grande des batailles ! Enfin ! Mais oui, on l'aime, on l'adore cet homme-là ! 
Il y aura aussi le reniement : les disciples qui lâchent le maître, même celui qui a juré de ne jamais le quitter et qui se surprend à l'abandonner publiquement. Mais oui, on l'aime, mais enfin... si c'est trop dur... 
Il y aura le confinement : les disciples qui, atterrés par la mort du maître, se cachent, terrorisés de devoir subir le même sort si ça se sait, qu'ils sont les disciples de ce maître-là : mais oui, on l'aime... mais il vaudrait mieux que ça reste discret. 
Sommes-nous bien sûrs de n'être pas les mêmes disciples ? attendant la grande libération glorieuse ? renonçant quand ça devient trop dur? cachés parce que c'est trop dangereux ? Ceux qui disent ou qui pensent "Oui on l'aime, mais..." Qui d'entre nous oserait se dire meilleur ? C'est la semaine des faux-semblants, la semaine des masques qui vont bientôt tomber. C'est la semaine où nous sommes invités à admettre que nous aussi, au quotidien, nous portons des masques pour faire face aux circonstances, et que nous sommes toujours prêts à en changer bien vite quand les circonstances changent. 
Entendons-nous : c'est au milieu de ces erreurs de perspective, de ces idées grandioses plaquées sur un Dieu autre, de ces renoncements au coeur des difficultés, que Dieu s'approche et qu'il nous convoque à le suivre. C'est là, et pas ailleurs. C'est avec tout ça comme bagage. Avec nos masques pour bagages. Malgré eux. 
Admettons-le, cette semaine encore, nous préférerions nos masques habituels, ceux qui nous permettent de nous confronter à autrui sans perdre la face, les petits arrangements avec nos vérités, les petites histoires qui nous font paraître meilleurs et plus aimables. 
Qu'il nous soit donné de poser ces masques pour être en vérité autant que faire se peut. Qu'il nous soit donné de rencontrer autrui avec sincérité, sans crainte et sans fard, lorsque c'est possible et que dans ce temps de communications virtuelles, nous ne devenions pas de simples porteurs de masques.
Si nous avons foi en Dieu, nous le savons : devant lui, pas de masque possible, ni pour lui, ni pour nous. Cette semaine sainte, c'est cela qui se joue pour nous... 

Giotto

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