Pour l'Église catholique, une paroisse est la communauté de fidèles regroupés autour du curé qui a reçu délégation de l'évêque. L'évêque a autorité sur le diocèse, le curé sur la paroisse. Il y a une dimension géographique, d'ailleurs les paroisses ont donné leurs noms aux subdivisions administratives que sont devenues les communes au moment de la Révolution (c'est pour ça qu'elles ont souvent des noms de saints). Là où une paroisse s'arrête, une autre commence, de sorte que l'ensemble du territoire est couvert et que chaque paroissien sait de quelle paroisse il dépend.
Par contre, pour les protestants, il n'est pas question de géographie. On ne parle d'ailleurs pas, dans les textes officiels, de paroisse, mais d'Église locale. Et l'Église, pour les protestants, ce n'est pas un lieu, ce n'est pas un territoire, c'est un événement : l'événement d'une Parole partagée, que ce soit sous la forme du culte (et plus spécifiquement de la prédication) ou des sacrements (le baptême et la Cène). Il arrive que je parle ici de paroisse ou de paroissiens, mais je le fais à la façon protestante, pour être sûre d'être comprise dans une culture majoritairement catholique !
Car en France, pays modelé par le catholicisme, on continue de penser en termes de territoire lorsqu'on pense à l'Église. Même si est protestant depuis les galères, si j'ose dire. Et on comprend pourquoi : quand on habite quelque part, on "fait Église" avec ceux qui sont là, on s'enracine dans cette communauté-là, c'est normal. Encore faut-il ne jamais perdre de vue que ce n'est pas ainsi que l'Église protestante unie de France, dont je suis ministre, est conçue. Dans cette Église-là, on n'est jamais le pasteur d'un lieu : on n'est pas le pasteur de X, mais le pasteur de l'Église, envoyé à X. À la limite, on pourrait imaginer un énorme pool de pasteurs qui bougerait tout le temps dans les communautés locales, ce serait pertinent du point de vue théologique. Humainement, ce serait sûrement plus compliqué... On pourrait imaginer aussi une Église totalement dépourvue de lieux de culte, qui continuerait à prêcher et à se réunir autrement, ça fonctionnerait aussi (c'est ce qui s'est passé pendant les temps de Désert). Mais là aussi, humainement, c'est compliqué... nos "anciens" sont souvent très attachés aux lieux de culte où ils ont vécu leur vie de foi, et les "nouveaux" ont besoin de repères dans l'espace, comme tout le monde.
Mais sur le fond, il importe de se souvenir que le pasteur n'est jamais chargé d'un territoire. Il accompagne des gens qui cherchent à vivre en disciples dans l'écoute de la Parole et la célébration des sacrements.
Lorsque Paul écrivait partout pour essayer d'entraîner les Églises à faire une collecte pour l'Église de Jérusalem, il rappelait longuement, puissamment, que ce qui fait l'Église, ce n'est pas la couverture la plus totale possible d'un territoire, mais la solidarité entre des communautés réunies par leur tête, c'est-à-dire le Christ. Ce qu'il esquissait ainsi, c'est ce à quoi nous appartenons encore aujourd'hui : une institution-corps, qui existe parce que les communautés locales sont solidaires les unes des autres, à l'écoute d'un Autre.
église ND de La Charité-sur-Loire |
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